Succédant à une NES au succès écrasant, Nintendo a pris tout son temps pour sortir sa Super Nintendo. En effet, le marché des consoles de 4e Génération est déjà occupé par la Mega Drive de SEGA et par la PC-Engine de NEC/Hudson (le cas de la Neo-Geo étant à part). Nintendo a pris le temps pour 3 raisons : tout d'abord ils étaient leader sur le marché des consoles de salon, puisque la NES a eu un succès monstre (62 millions de consoles pour une machine sortie en 1983, c'est vertigineux !) et elle équipe toujours des millions de foyers. Les jeux étant chers et souvent réservés aux enfants, il faut bien comprendre qu'à l'époque les joueurs n'avaient qu'une seule console et n'achetaient que quelques titres par an. Ensuite, en 1989 Nintendo sortait la Game Boy et une fois encore, le succès est au rendez-vous car c'est un véritable raz-de-marée qui déferle sur le secteur, en envahissant de façon massive le jeu nomade, au détriment des jeux électronique. Enfin, de façon plus prétentieuse, Nintendo regardait ses concurrents de haut. La Neo-Geo était un monstre de puissance mais tellement chère qu'elle était inaccessible à un large public. Malgré de bonnes qualités, la PC-Engine a bien du mal à séduire hors du Japon et au fond, elle reste une console 8-bits. Quant à la Mega Drive, il suffit de voir les premiers jeux qui sont sortis dessus (à quelques rares exceptions près) pour comprendre qu'il n'y avait pas (encore !) réellement de concurrence. Si la console hybride de NEC/Hudson a vu le jour en octobre 1987 et que celle de SEGA est sortie en octobre 1988, de son côté la Super Nintendo verra le soleil (levant) en novembre 1990 (oui, 2 ans après SEGA, 3 ans après NEC !).
NES et Coca-Cola...
En Europe la Super Nintendo a été l'une des consoles de salon les plus plébiscitée du jeune marché du jeu vidéo. Aux Etats-Unis elle portait le nom de Super NES et au Japon celle de Super Famicom. Si les consoles Européenne et Japonaise ont un design identiques, la version Américaine est par contre bien différente. Plus "carré" et tout en "violet", Nintendo expliqua un jour la raison de ce relooking : les Américains avaient pour habitude de poser leurs canettes de Coca-Cola sur leur NES (qui était cubiques rappellons-le) et avec le design de la Super Famicom ainsi que les mauvaises habitudes, il y a eu des accidents, forcément. Voilà pourquoi la Super NES a un design totalement différent, avec bien évidemment les cartouches qui concordent avec. Par contre, rien n'explique que les touches soient devenues violettes, délaissant ainsi le codage couleur des autres régions.
La Super Nintendo Européenne
A gauche la Super Famicom (la version Japonaise) et à droite la Super NES (version américaine)
Très avant-gardiste sur l'Hardware, la Super Nintendo utilisait des technologies de pointe, faisant d'elle une machine hors norme. Bien que moins puissante que la Mega Drive, la console 16-bits de Nintendo avait pour elle une excellente palette de couleurs affichables, des capacités sonores bien meilleures et des co-processeurs arithmétiques qui permettaient d'afficher des effets jusque-là jamais vu. C'est le fameux Mode7 ! Il permet d'effectuer des zooms, des rotations, des mosaïques, des transparences, des distorsions, des morphings... sans alourdir la tâche d'un processeur central (avouons-le) un peu faible. Ce sont ces fonctions annexes et parfaitement gérées par l'Hardware, qui permit de souvent surclasser la Mega Drive de SEGA, qui pourtant, avait une puissance brute bien plus élevée (mais qui souffrait d'une palette de couleur réduite et de capacités sonores bien moins performantes).
Voici l'exemple typique de ce que peut faire le Mode7 qui produit ici un zoom plus une rotation de façon hardware, là où sur les autres consoles le CPU doit calculer image par image
Voici le modèle d'origine de la carte mère. Avec le temps, elle subira plusieurs modifications, des simplifications et des jumelage de puces (cliquez sur l'image pour l'agrandir)
Les cartouches Super Nintendo et Super Famicom sont identiques mais incompatibles, puisque Nintendo a zoné ses consoles. En parallèle, étant donné la forme de la Super NES (la version américaine), les cartouches arborent par la même occasion un design plus anguleux. Les cartouches classiques faisaient de 4 Mb (512 Ko) à 8 Mb (1 Mo) au lancement, mais très vite ces limitations furent franchies. Le premier jeu de 16 Mb (2 Mo) fut Street Fighter II, le premier jeu de 24 Mb (3 Mo) fut Street Fighter II Turbo et le premier jeu de 32 Mb (4 Mo) était Super Street Fighter II. Comme quoi, les jeux de Capcom aimaient franchir les limites et devant le succès de la franchise à cette époque-là, on comprend pourquoi Nintendo a bien voulu fournir des cartouches toujours plus grosses. A noter que les cartouches Super Nintendo coutaient très cher : en moyenne 450 à 500 Frs (65 à 75€). Elles étaient donc en moyenne 100 Frs (15€) plus chères que les cartouches Mega Drive.
Différence entre une cartouche Super NES (USA) en haut, et Super Nintendo (Euro) en bas
En marge de la simple taille de la ROM, les cartouches Super Nintendo avaient également cette particularité de posséder si besoin des extensions. Grâce à ces pins supplémentaires, la Super Nintendo sera allée au délà des espérences. En intégrant des co-processeurs aux cartouches, la console pouvait atteindre un niveau de performances vraiment étonnant, surclassant son statut de simpe console 16-bits.
Les cartouches pouvaient avoir des extensions de connexions, ce qui permettait d'inclure des co-processeurs ou des puces de décompression de données, d'ajouter de la RAM ou d'inclure un accélérateur graphique
71 jeux ont utilisés un panel de 17 puces additionnelles, allant de l'accélération matérielle de la 3D (en Flat Shading) à l'accélération des capacités 2D, certaines puces servaient à décompresser les données, d'autres étaient là pour aider le CPU à réaliser certains calculs purement mathématiques. Si Capcom a développé ses propres puces (les C4 et Cx4) les plus connues restent les SuperFX et SuperFX 2, développées par Argonaut Software et Nintendo. Le jeu ayant lancé le phénomène n'est autre que le cultissime Starwing, puis grâce à ces accélérateurs, ces boosters de performances, la console a accueillie des titres aussi ambitieux que Yoshi's Island, Kirby's Dream Land 3, Street Fighter Alpha 2 ou encore un portage assez intéressant de DOOM. Sans ces puces, de tels jeux n'auraient pas pu sortir sur Super Nintendo, du moins dans un tel état d'excellence technique...
Grâce au SuperFX, la console a été capable d'afficher une véritable 3D en Flat Shading. Une prouesse technique sans précédent dans le monde du jeu vidéo !
La cartouche de Starwing
La Nintendo 64 mettant trop de temps à arriver (puisqu'elle mettra 2 ans de plus que les PlayStation et Saturn à voir le jour) et pour éviter de perdre trop de clientèle, Nintendo s'est arrangé pour étaler les sorties des derniers jeux Super Nintendo. Généralement très ambitieux, le constructeur n'hésitait à fournir les plus grosses cartouches agrémentées de ses plus belles puces additionnelles, pour continuer à faire vivre une console qui face à elle, n'avait plus vraiment les moyens de lutter. En parallèle, afin de relancer un peu les ventes Hardware, Nintendo a également mis sur le marché une Super Famicom Junior (aussi connue sous le nom de Super Famicom 2, Super NES Junior, Super NES Mini ou encore New-Style Super NES aux Etats-Unis), dont les changements ne sont pas qu'esthétiques. Ce modèle "low cost" n'est pas compatible avec le BS-X (voir ci-dessous) mais possède bien les connexions supplémentaires des cartouches, afin de profiter de toute la ludothèque de la console. Au niveau de la carte mère, en plus d'une réduction des dimensions, Nintendo en a profité pour la simplifier et jumeler plusieurs puces ensemble. Comme en Europe on est de suite passés à la génération suivante avec les Saturn de SEGA et PlayStation de Sony, nous n'avons pas eu droit à la Super Nintendo Junior.
La New-Style Super NES (version US), appelée Super Famicom Junior au Japon (ci-dessous sa carte mère)
Entre autre projet ambitieux et sorti uniquement au Japon (comme d'habitude), le Satellaview (aussi connu sous le nom de BS-X - BS pour Broadband Satellite) se fixait sous la console et permettait de télécharger des jeux (certains gratuits, d'autres coutaient l'équivalent de 7,5€) grâce aux signaux TV de la chaîne satellite japonaise St GIGA. Généralement, les jeux étaient téléchargeables par épisodes (comme BS-Zelda) et pouvaient être enregistrés sur une cartouche vierge.
Le Satellaview (aussi connu sous le nom de BS-X)
Plus ambitieux encore, Nintendo a signé avec Sony un projet de partenariat, suite à l'excellent DSP sonore que la société créa pour la Super Famicom / NES / Nintendo (le fameux chipset audio, développé par Ken Kutaragi -futur père de la PlayStation- et qui lui donne se timbre si particulier). Voulant contrer le Super CD-ROM² de NEC/Hudson et le Mega-CD de SEGA, le projet "Play Station" (en 2 mots) visait à révolutionner leur console 16-bits. Première limitation, le port d'extension de la console ne possédait qu'un bus 8-bits, ce qui causa divers problèmes. Mais Sony visait grand et ce n'était pas du goût de Nintendo. Avec la Play Station, Sony voulait faire une véritable console 32-bits, puissante et compatible SNES, bien entendu. Suite à ses divergences le projet fut abandonné et c'est Philips qui reprit le flambeau. Mais au final Nintendo sortit la Super Famicom Junior et abandonna définitivement tout projet d'add-on, pour se consacrer à la Nintendo 64. Philips garda des relations étroites avec Nintendo, ce qui fait que 3 horribles épisodes de Zelda sortirent sur CDi. Quant à Sony, son projet a été conservé et il est devenu la PlayStation (en un seul mot) avec le succès qu'on lui connait. Un succès qui a failli causer la perte de Nintendo et qu'ils ont dû longtemps regretter...
Le projet Play Station de Sony
Le projet CD-Rom de Philips
Terminons avec les manettes et accessoires. Etant donné les différences physiques qu'il y a entre la Super Famicom / Nintendo (les versions Japonaise et Euro de la console) et la Super NES (la version américaine), il fallait se douter qu'au niveau du gamepad, il y aurait également quelques modifications. La version Japonaise et Européenne arbore le fameux code de couleurs qui inspirera Sony pour son gamepad (qui en plus y ajoutera des symboles) et Microsoft. D'ailleurs vous aurez sûrement déjà remarqué que Microsoft utilise les mêmes lettres (A-B-X-Y) ainsi que les mêmes couleurs (rouge-jaune-vert-bleu) mais dans un ordre différent. Ceci dit pour les Etats-Unis, le logo a été modifié et les touches sont devenues violettes. Un drôle de choix...
A gauche la manette Européenne et son logo quadri-couleurs, à droite la manette américaine et son logo monochrome
La manette de Super Nintendo fut une mini révolution. Elle reprend bien sûr la fameuse croix directionnelle inventée par Gunpei Yokoi (le créateur des Game & Watch et du Game Boy) et on retrouve les 2 touches de gestion Start et Select. La Mega Drive imposait déjà 3 touches d'action disposées en ligne, la Neo-Geo en mettra 4 mais Nintendo aura l'idée de génie de disposer ses 4 touches en croix, afin que 2 d'entre eux tombent instantanément sous le même pouce. Plus innovant encore, sur la tranche haute on retrouve 2 boutons supplémentaires : les fameuses gâchettes L et R. Ces gâchettes faisaient en sorte que désormais on "épouse" le pad dans son entièreté, vu que les gâchettes étaient activées par les index. Ces innovations sont tellement importantes dans le milieu du jeu vidéo, qu'aujourd'hui encore (des décennies plus tard), les touches d'action sont toujours en croix et tous les gamepads disposent de gâchettes. Et pour ne rien gâcher, la manette offrait une excellente prise en mains, une précision et un confort sans égal, en plus d'offrir plus de touches qu'aucun autre pad de son temps. Ce pad était si proche de la perfection que même aujourd'hui, c'est toujours un plaisir de le prendre en mains.
Comme tous les consoles à succès, la Super Nintendo a reçu un nombre très important d'accessoires. Alors bien sûr on retrouve les classiques Game Genie, Action Replay et autres adaptateurs de dézonage, où il fallait insérer une cartouche Euro à l'arrière et la cartouche étrangère à l'avant, afin que notre console puisse passer les jeux américain et japonais. On retrouve également les sticks Arcade, dont le fameux Super NES Advantage, qui reprend le design et les fonctions du NES Advantage d'autrefois. Il y a également une souris (à boule, avec son tapis) qui a surtout servi pour Mario Paint mais pas seulement. Elle était compatible avec certains jeux de gestion, casse-tête et autres RPGs (Civilization, Lemmings 2, Might and Magic III, SimAnt, Populous II, Powermonger...) mais aussi des jeux nettement plus musclés comme le rail-shooter Terminator II Arcade Game ou encore le FPS Wolfenstein 3D.
Les Super NES Advantage et la souris
Nintendo a également sorti le Super Scope, un "light gun" qui prenait la forme d'un... bazooka ! Ce "form factor" était très certes original (très original même !) cependant il était très inconfortable, on ne voyait absolument rien de ce qu'on visait à l'écran et une fois démonté on s'aperçoit qu'à l'intérieur, rien ne justifiait un tel appareil, puisque c'est pour ainsi dire vide ! Encombrant, le Super Scope était rapidement fatiguant à l'usage. Bien que vendu avec une compilation de 6 mini-jeux plus ou moins divertissants (une cartouche joliment nommée Super Scope 6), ce bazooka fut un échec commercial et seulement 12 jeux furent compatibles (cartouche de mini-jeux comprise).
Le Super Scope
La position de jeu était inconfortable, causant rapidement des crampes. De plus, en visant on ne voyait plus rien !
A l'intérieur, c'est pratiquement vide !! Alors pourquoi fabriquer un tel engin, quand une simple forme de pistolet suffit ? Sachez également que le Super Scope avait besoin du Super Scope Receiver pour fonctionner
Et on termine ce tour des accessoires avec le Super Game Boy. C'est une cartouche-adaptateur qui permet de jouer à ses jeux Game Boy à travers la Super Nintendo. On profite ainsi d'un écran plus grand, du confort d'un vrai pad, du son stéréo et bien entendu... plus besoin de piles ! Sorti en 1994, le Super Game Boy coûtait un peu moins cher qu'une cartouche de jeu (environ 400 Frs / 60€). Le système pouvait convertir en couleurs les 4 tons de gris des jeux Game Boy. Plus tard, les jeux possédaient des informations de couleurs additionnelles et des bordures spécialement dédiées au Super Game Boy, afin d'embellir le rendu. Le Super Game Boy n'avait pas de port EXT (qui sert à connecter le câble link), il fut ajouté au Super Game Boy 2, sorti en 1998 (ce dernier corrigeait également quelques défauts de cadence et de sons aigus). Cependant, aucune version de Super Game Boy ne permet de jouer aux jeux Game Boy Color, seuls les jeux monochromes étaient compatibles (pour ça, il faudra attendre la sortie du Game Boy Player pour GameCube).
Les Super Game Boy 1 et 2
Au final, la Super Nintendo aura été une excellente console. Ses fonctions "câblées" innovantes, sa qualité sonore, son excellent gamepad et la qualité souvent hors norme de ses jeux, en font une console mythique qui, bien des années après sa mise à la retraite, fait toujours rêver des milliers de joueurs. Il faut dire que la 4e Génération de consoles aura vraiment eu quelque chose de magique (d'où sont appelation "d'âge d'or" du jeu vidéo) et il est clair que la Super Nintendo aura grandement contribué à ça. Cette console restera l'un des très grand succès de Nintendo, une machine qui aura vu naitre pas moins de 1757 jeux (tous territoires confondus) et qui aura vendus plus de 59 millions de consoles.
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Les caractéristiques techniques
Processeur principal :
65C816
Développé par :
Nintendo - Ricoh
Spécifications :
basé sur l'architecture du Ricoh 5A22 - 16-bits - cadencé de 1,79 à 3,58 Mhz switchable
Processeur vidéo :
2 x Picture Processing Unit (PPU1 et PPU2)
Développé par :
Nintendo
Spécifications :
plus communément appelé Mode7 - 16-bits - gestion d'effets graphiques
Processeurs additionnels :
DSP audio Sony SPC700 (8-bits) + S-DSP (synthétiseur musical)
RAM principale :
128 Ko (WRAM : Work RAM)
RAM vidéo :
64 Ko (VRAM)
RAM audio :
64 Ko (SRAM)
Capacités graphiques :
128 sprites - 256 couleurs affichables parmi 32.768 - 4 plans de scrolling - effet câblés (appellés effets Mode7) : zoom, rotation, distortion, transparence, 3D (à peine quelques polygones en Flat Shading), mosaïque, morphing
Capacités sonores :
qualité 16-bits à 32 Khz - 8 voies ADPCM - effets sonores : chorus, réverbération, vibrato
Supports :
cartouche de 4 à 60 Mb (512 Ko à 7,5 Mo)
Joueurs max :
5 (via un multitap)
Autres :
les cartouches supportent des co-processeurs additionnels tels les Argonaut SuperFX/Mario-Chip1 (accélération matérielle de la 3D en Flat Shading), Argonaut SuperFX2 (accélération matérielle de la 2D et de la 3D en Flat Shading), Capcom C4/Cx4 (mapping et transformations de wireframes), Nintendo SA-1 (compression des données, accélération matérielle), DPS-1/2/3/4 (accélération des opérations mathématiques)... pour les plus connus. En tout 71 jeux utilisent un panel de 17 puces additionnelles.
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